Parfois, j’ai vraiment l’impression de venir d’une autre planète tant je suis surprise par diverses postures sociales ou comportementales que je rencontre en Grèce. Et pour la plupart, je dois m’y conformer, m’y habituer et souvent faire la sourde oreille et trouver cela normal. Ce n’est pas le côté le plus jojo de ma vie ici, mais en résumé, vous le lirez plus loin, je suis moins sévère que mon ami grec.
En général j’ai une grande capacité d’adaptation mais certains traits me heurtent toujours après bientôt quatre ans sur l’île.
Ci-dessous je vais exposer en premier lieu des traits que j’estime négatifs, mais rassurez-vous il s’en suivra une liste bien plus impressionnante de ce qui force mon admiration et mon estime du Grec.
Être insulaire :
Il y a en tout d’abord le fait d’habiter une île et de me frotter à des insulaires. C’est très particulier. La 1ère chose qui m’a frappée et qui me laisse toujours dans un changement profond, c’est l’humilité dans laquelle nous sommes plongés. Nous dépendons vraiment de plus grand que nous.
La météo ! …Nous n’avons aucune prise sur elle, nous sommes réduits à patienter, à être bloqués un jour, deux ou davantage si le ciel nous coupe du reste du monde.
Notre toute puissance, nos capacités à décider, à maitriser, est réduite à néant en cas de très mauvais temps car les ferries ne circulent plus et nos projets tombent à l’eau. C’est le cas de le dire !
Ainsi se développe une certaine solidarité, un type de relations inconnues sur le continent ou telles que je les avais connues jusqu’à présent.
Humilité devant notre petitesse, notre dépendance. Cela a été une révélation profonde, m’incitant davantage à considérer à quel point nous sommes comme des fourmis devant l’immensité de ce qui nous dépasse, de Qui nous transcende et crée toutes circonstances.
Bon ça c’est un point en même temps très positif et sur le plan pratique qui nous oblige à observer le ciel 2 ou 3 jours avant chaque voyage afin éventuellement de l’avancer ou de prendre notre mal en patience si nous le pouvons.
Aspects négatifs à mon goût, généralités incluant toutes les exceptions.
Il y a d’autres aspects de la vie grecque ou insulaire que j’ai remarqués. Je les mélange, ne pouvant déterminer en général s’ils sont totalement grecs ou insulaires. Je les dépose en vrac ci-dessous :
Circulation routière :
A part en juillet ou août où la police s’acharne à mettre des amendes pour un oui ou pour un non (il faut bien faire son beurre, n’est-ce pas ?), la notion de parcage est vraiment fantasque et cela est très rigolo. Vous pouvez vraiment vous parquer où vous voulez, comme vous voulez et cela donne un aperçu assez particulier dans certaines rues. Mon amie Gloria s’en est beaucoup amusée et moi j’apprécie cette liberté, elle correspond bien à quelque trait de caractère que je dois souvent trop maîtriser.
En revanche la conduite grecque est parfois difficile : peu importe les stops, les céder-le-passage. Il nous faut donc être très prudents et réactifs car vous pouvez être amenés à planter sur vos freins lorsqu’un malakas (peut être traduit par co..ard ou toute autre insulte usuelle) vous coupe la route d’une façon inacceptable à vos yeux de conducteur respectueux du code la route,
Et dans la même veine, camions, cars vous obligent à mordre les talus sur votre droite si vous ne voulez pas risquer un face à face trop brutal. Et ne prenez pas le risque de les dépasser, surtout si vous avez une voiture qui se la pète, ils vont vous faire mordre la poussière.
Mais cela, en tout cas sur l’île, à Athènes c’est différent, vous avez aussi alors la liberté de rouler un peu comme vous voulez…j’aime. Mais attention, sur le continent ne vous y risquez pas, la police est omniprésente.
Ce que j’aime un peu moins c’est quand vous trouvez votre véhicule abîmé, rayé ou pire et que, bien entendu, personne ne s’est annoncé pour en porter la responsabilité.
Et vous vous ferez engueuler à tout bout d’champ sur la route, pour rien et surtout parce que vous les avez surpris ou dérangés, même sans être fautifs. Alors gueuler au volant, faire des signes agressifs est commun et malheureusement je m’y suis mise intensivement !
La politesse est toute autre :
Dire s’il-vous-plaît, merci semble venir d’une autre planète. Certes vous entendez sans cesse des efrarsito (merci), un peu comme la grêle après la vendange, mais si vous rendez un service, répondez à une question, laisser la priorité ou autre, il est extrêmement rare de recevoir les marques de politesse qui sont les nôtres dans notre bonne éducation helvétique. Bon il paraît que ça se perd aussi chez nous. Mais ici en Grèce cela n’a jamais été acquis et je m’en offusque souvent. Ce peuple qui fut l’un des premiers à recevoir culture et éducation semble complètement dénué de la politesse la plus élémentaire. Qu’il soit bien noté, ainsi que je l’ai écrit dans un autre texte, j’aime la Grèce et j’aime les Grecs, beauté, enthousiasme et tant d’autres aspects priment sur ces traits que je n’aime pas. C’est
juste pour moi une manière ici de relever certains traits qui, à mon avis pourraient être améliorés facilement et je ne me décourage pas, sur la route, par exemple de faire un petit signe en guise de remerciement quand il a lieu d’être et je vois que cela porte du fruit : de plus en plus, certains le font. Il n’y a donc pas lieu de désespérer du genre humain. OUF !
Mais dans la relation, éduquer à dire s’il-te-plaît, merci, est un chemin de longue haleine…je m’épuise.
Et les invitations, ah les invitations !
J’en ai fait plusieurs. Par contact direct, par téléphone, par whatsApp ou messages. Les réactions sont extraordinaires : par contact direct : oh merci, je suis honoré, c’est super, merci. Par téléphone, idem. Par messages de diverses sources : rien. Aucune réaction, aucune réponse, positive ou négative. Rien, le néant.
Et au final, personne ne vient. Les Grecs ne se déplacent pas pour ça et ils ne t’avisent pas alors qu’ils t’avaient dit qu’ils viendraient, rien….et toi t’as préparé pour un régiment. Seuls les étrangers viennent avec plaisir. Il n’y a pas forcément de retour d’invitation !
Il semble que le fait de ne pas aller chez des privés pour une invitation soit d’ordre culturel et pourtant, Dieu sait que les Grecs aiment la fête. Et chez moi, il y a abondance de nourriture, musique et DJ au bar du jardin….
C’est clair je n’invite plus de Grecs, que c’est triste. Bon je dis ça………mais……je me connais et ceux qui me connaissent savent que je ne tiendrai pas devant ce vœu pas pieux !
Voce a capelle, forte, fortissimo :
A la manière des peuples du sud, les Grecs parlent souvent très, très TRES fort et s’interpellent en hurlant même s’ils sont à 10 ou 20 mètres de distance, même au milieu d’un magasin. Prenez vos boules quiès…
Un des comportements des plus irritants est d’être sans cesse interrompus. Sans cesse et parfois avec la même personne, vous pouvez être interrompu plusieurs fois par une ou plusieurs personnes ou par la même personne plusieurs fois. C’est juste insupportable et si fréquent.
Que ce soit dans une conversation des plus personnelles ou dans un magasin ou lorsque vous téléphonez, cette manière de faire est hyper répandue. A quoi correspond-elle ? quelle est cette impatience, ce non-respect ou manque d’éducation, je ne sais mais c’est absolument insupportable. Oui je sais, cela se passe aussi ailleurs, mais à cette fréquence ! c’est du jamais vu, du jamais vécu ailleurs.
En revanche vous pouvez faire de même, personne ne vous en tiendra rigueur.
Regard grec sur les Grecs :
Ce que je viens de relever est également noté par mon Kostas de Grec. Même si lui-même fonctionne (à mon grand désarroi) comme certains exposés ci-dessus, pas tous je vous rassure, il est le premier à dire que son peuple est mal éduqué, que ses compatriotes se comportent comme des rustres. Lui-même est plutôt du type intellectuel avec une immense culture littéraire et musicale, mais… il se comporte comme un homme des cavernes dans certaines situations (expression peut-être mal choisie, vu que je ne sais pas comment on vivait la politesse à l’époque). Et pourtant il est aussi galant homme, serviable et très porté sur le respect, l’obéissance à la loi, etc…
Lui-même discerne chez les Grecs 2 types : les éduqués et les « gorilles ». Selon lui le 1er groupe ne représente que 20% de la population, Les gorilles, hommes et femmes confondus se distinguent par l’impossibilité de mener une conversation
sérieuse. Ou elle rapidement abrégée ou alors tournée sur soi, en égocentricité absolue
Car hommes et femmes selon son appréciation, savent tout, connaissent tout, mais en réalité beaucoup sont assez ignorants et s’ils entrent dans un dialogue, il est rapidement coupé ou détourné faute d’arguments et l’ignorance générale ou spécifique est alors démasquée, mais ce ne sera jamais de leur fait. Tout prétexte pour écourter la conversation sera bon.
L’amitié et l’hospitalité sont des qualités répandues mais pas générales d’après Kostas et alors pour abonder dans son sens, en 4 ans sur l’île je n’ai été invitée qu’une seule fois par des Grecs, même si moi je les conviés plus d’une fois.
Ah, enfin du positif à en revendre :
Cela m’amène à, enfin, constater et partager de nombreuses qualités du peuple grec.
Serviables, les gens sont très, et généralement, serviables. Vous pouvez demander un service, un renseignement et ils ne répugneront pas à se déplacer, à prendre du temps pour vous aider, à trouver un magasin, une rue, une aide…
Confiants, généreux, vous avez oublié votre portemonnaie ou vous n’avez pas assez sur vous, qu’importe, le vendeur vous laisser partir avec votre marchandise et vous fera confiance pour repasser plus tard, demain ou d’ici quelques jours. C’est remarquable et m’est arrivé plusieurs fois, toujours étonnée de ce fait.
Gais, joyeux, propices à chanter, à danser, spontanés dans leurs réactions, ils sont d’agréables compagnons de soirées.
S’amuser, jouer, oh que oui, ils le font. Certes il y a le jeu national, que dis-je le jeu, le sport national qu’est le Taveli (le backgammon). Sur la table de jeu, il y a 3 possibilités de jouer, en disposant les pièces de trois façons différentes. Ce jeu demande des qualités de stratège, mais aussi de réflexion
immédiate et d’adaptation car à chaque lancé de dés, le jeu peut changer et vous forcer à modifier votre plan initial.
Cela donc imprègne le caractère grec.
Le Grec peut être très travailleur et entreprenant. Il est aussi curieux. Evidemment ces qualités vont aller s’accroissant en fonction des aptitudes personnelles et l’on rencontrera, comme partout, des niveaux très différents, éloignés en capacité comme de la terre à Mars. Mais bon cela n’est pas propre à la Grèce, n’est-ce pas ?
Le Grec est fier, voire orgueilleux. Fier de son pays, de sa culture, de sa nation. Lutteur, combattif, il a sans cesse, et aujourd’hui encore, fait face à toutes sortes d’envahisseurs. C’est à se demander qui n’a pas voulu s’emparer de ce pays et ça continue aujourd’hui, évidemment avec comme ennemi direct la Turquie, qui entre nous soit dit, est le seul occupant qui n’a laissé aucune trace positive de sa présence, 400 ans quand même, mais aussi avec l’Europe qui pour le sous-sol, les gisements sous-marins s’emparent économiquement de la Grèce et c’est une honte. Et s’il fallait parler de l’Allemagne qui depuis la Guerre n’a cessé de spolier la Grèce, il me faudrait un bouquin pour narrer ce triste chapitre. Aujourd’hui la Grèce ne s’appartient plus, elle est allemande et je ne vous décris pas la colère de ceux qui s’en rendent compte…Mais c’est un autre sujet tellement grave et révoltant que des pages et des pages y seraient nécessaires.
Le Grec résiste, il est stratège, patient et sait relever la tête pour ne pas se soumettre. Il est fier de son histoire quand il est cultivé et prompt à la communiquer. Il aime le théâtre, la philosophie et cela remonte à loin.
Si aujourd’hui tous ne sont pas philosophes ou intellectuels de haut vol, ils portent quand même en eux une histoire, une tradition exceptionnelles.
Mille raisons de venir en Grèce ou d’y passer du temps :
Voilà, entre autres, pourquoi il est bon, intéressant de découvrir ce pays, cette île et ce peuple. Je pourrais évoquer aussi le courage de vivre dans des conditions climatiques ou dans des régions austères et d’y survivre.
Cela n’enlève rien à la beauté extraordinaire des paysages, la mer, le ciel, le sol, la nature, tout est propice à l’émerveillement et vous trouverez dans le texte présentant Tinos (dans la rubrique Cyclades) de multiples raisons de venir et d’aimer mon île.
Je reconnais mon plaisir infini quand j’y descends en voiture de visiter, me promener dans d’autres régions très différentes et tellement belles et attrayantes. Ce pays est immense et magnifique. Nature, histoire, traces du passé, culture actuelle vous enchanteront.
J’espère à la conclusion de ce texte vous avoir donné l’envie de partager mon plaisir à être en Grèce plusieurs mois par année et ce, autour d’un superbe repas, car jusqu’ici je ne vous ai pas parlé de la cuisine grecque et des produits excellents que nous pouvons déguster de la mer à la terre, des profondeurs au fruit des abeilles, célestes ouvrières.
Ce goût de miel marquera la conclusion de mes remarques et le début de vos découvertes.